25 avril 1974 : 2 chansons qui ont marqué la Révolution des Œillets

La Révolution des Œillets – Revolução dos Cravos – a eu lieu le 25 avril 1974. Elle marque le dernier jour de la dictature salazariste au Portugal.

Deux chansons ont marqué cette journée historique : « E Depois do Adeus » de Paulo de Carvalho et « Grândola, Vila Morena », de Zeca Afonso.

Comme c’est bientôt le 25 avril, c’est l’occasion d’en apprendre un peu plus sur cet évènement indissociable de l’histoire du Portugal et d’écouter ces deux chansons qui ont lancé les opérations du coup d’état !


La Révolution des Œillets

Voici quelques éléments pour comprendre le contexte de la révolution du 25 avril 1974.

Depuis 1926, le Portugal est une dictature.

António Salazar, ancien ministre des Finances, devient chef du gouvernement en 1932. Il instaure l’Estado Novo, un régime nationaliste et autoritaire basé sur la censure et la répression, et qui s’appuie sur l’armée et sur la police politique PIDE (Polícia internacional e de defesa do estado).

En 1968, malade, Salazar est contraint d’abandonner le pouvoir. Il désigne alors un homme de confiance pour lui succéder : Marcelo Caetano.

En 1974, le Portugal est enlisé depuis 13 ans dans une guerre coloniale. Cette guerre oppose l’armée portugaise aux mouvements qui luttent pour l’indépendance des territoires africains que le Portugal gouverne à l’époque : l’Angola, le Mozambique et la Guinée.

Le gouvernement portugais, déterminé à maintenir son emprise sur les colonies, envoie tous les jeunes au combat en Afrique. Des milliers de Portugais y perdent la vie. Près de la moitié des dépenses du pays est consacrée à la guerre.

Le coût de la guerre et la mobilisation des jeunes augmentent le mécontentement d’une population déjà crispée par les problèmes économiques. Et une partie de l’état major portugais ne croit plus en la victoire dans les colonies.
L’idée de renverser le gouvernement par la force s’installe.

Un groupe de jeunes capitaines de l’armée forme alors le Movimento das Forças Armadas MFA (Mouvement des Forces Armées) et commence à préparer en secret un coup d’État militaire.

Le jour choisi pour l’action est le 25 avril 1974.

Le signal secret du début des opérations est donné à la radio.

Le premier signal, qui demande aux troupes de se préparer et de se mettre en place, est diffusé la veille à 22h55.
Il s’agit de la chanson « E Depois do Adeus » interprétée par Paulo de Carvalho, vainqueur cette année-là du Festival RTP de la Chanson et représentant du Portugal à l’Eurovision. Cette chanson n’a pas de contenu politique mais comme elle est à la mode, elle n’éveille pas de soupçons.

Le deuxième signal est donné à 0h20 par la diffusion de « Grândola, Vila Morena ». Cette chanson de Zeca Afonso est beaucoup plus politique : elle est interdite par le régime car considérée comme une allusion au communisme.
Cette chanson annonce le départ des militaires du MFA pour s’emparer des points stratégiques du pays.

À l’aube, les soldats du MFA expliquent à la population, via la radio, qu’ils veulent que le pays redevienne une démocratie, avec des élections libres et des libertés fondamentales.

Durant ces opérations, des capitaines du MFA s’expriment à la radio pour demander à la population à rester chez elle. Malgré cela, des milliers de Portugais descendent dans la rue pour soutenir l’armée. Ce qui était un coup d’État se transforme en révolution.

En quelques heures, le pouvoir s’effondre et le gouvernement finit par se rendre.

L’un des points centraux de ces rassemblements est le marché aux fleurs de Lisbonne. Un fleuriste a commencé à distribuer des œillets : certains militaires mettront cette fleur dans le canon de leur fusil, les civils la porteront sur leurs vêtements.

L’œillet (cravo) devient le symbole de la révolution, qui prendra le nom de Revolução dos Cravos (Révolution des Œillets)

Aussitôt après la révolution, la censure est abolie, les libertés fondamentales sont rétablies, et la même année, le Portugal déclare l’indépendance de ses colonies.

Un an plus tard, jour pour jour, le 25 avril 1975, ont lieu les premières élections au suffrage universel, permettant de désigner les députés chargés de rédiger la constitution. 

Et à nouveau un an après, la nouvelle Constitution du Portugal entre en vigueur. 

En souvenir de ces évènements historiques, le 25 avril est devenu un jour férié au Portugal, appelé Dia da Liberdade (Fête de la liberté).

Maintenant, place aux deux chansons qui ont déclenché les opérations ! Bonne écoute !


Paulo de Carvalho – E Depois Do Adeus

E Depois Do Adeus

Quis saber quem sou
O que faço aqui
Quem me abandonou
De quem me esqueci
Perguntei por mim
Quis saber de nós
Mas o mar
Não me traz
Tua voz.

Em silêncio, amor
Em tristeza, enfim
Eu te sinto, em flor
Eu te sofro, em mim
Eu te lembro, assim
Partir é morrer
Como amar
É ganhar
E perder.

Tu vieste em flor
Eu te desfolhei
Tu te deste em amor
Eu nada te dei
Em teu corpo, amor
Eu adormeci
Morri nele
E ao morrer
Renasci.

E depois do amor
E depois de nós
O dizer adeus
O ficarmos sós
Teu lugar a mais
Tua ausência em mim
Tua paz
Que perdi
Minha dor
Que aprendi
De novo vieste em flor
Te desfolhei

E depois do amor
E depois de nós
O adeus
O ficarmos sós

Et après notre adieu

J’ai voulu savoir qui je suis,
Ce que je fais ici,
Qui m’a abandonné,
Qui j’ai oublié.
Je me suis questionné sur moi-même
J’ai voulu savoir pour nous
Mais la mer
Ne m’apporte pas
Ta voix.

Dans le silence, mon amour,
Dans la tristesse, finalement,
Je te sens en fleur
Je souffre pour toi
Je me souviens de toi, ainsi
Partir, c’est mourir,
Comme aimer
C’est gagner
Et perdre.

Tu est venue en fleur
Je t’ai effeuillée
Tu t’es donnée en amour
Je ne t’ai rien donné.
Dans ton corps, mon amour,
Je me suis endormi.
J’y suis mort
Et en mourant,
Je suis revenu à la vie.

Et après l’amour,
Et après nous,
En se disant adieu,
En restant seuls
Ta place vide,
Ton absence en moi,
Ta paix
Que j’ai perdue
Ma douleur
Que j’ai apprise
De nouveau, tu es venue en fleur,
Je t’ai effeuillée

Et après l’amour.
Et après nous
L’adieu,
En restant seuls.


Grândola, Vila Morena – Zeca Afonso

Grândola, vila morena
Terra da fraternidade
O povo é quem mais ordena
Dentro de ti, ó cidade

Dentro de ti, ó cidade
O povo é quem mais ordena
Terra da fraternidade
Grândola, vila morena

Em cada esquina, um amigo
Em cada rosto, igualdade
Grândola, vila morena
Terra da fraternidade

Terra da fraternidade
Grândola, vila morena
Em cada rosto, igualdade
O povo é quem mais ordena

À sombra duma azinheira
Que já não sabia a idade
Jurei ter por companheira
Grândola, a tua vontade

Grândola a tua vontade
Jurei ter por companheira
À sombra duma azinheira
Que já não sabia a idade

Grândola, ville brune
Terre de la fraternité
C’est le peuple qui commande le plus
En ton sein, ô cité

En ton sein, ô cité
C’est le peuple qui commande le plus
Terre de la fraternité
Grândola, ville brune

À chaque coin de rue un ami
Sur chaque visage, l’égalité
Grândola, ville brune
Terre de la fraternité

Terre de la fraternité
Grândola, ville brune
Sur chaque visage, l’égalité
C’est le peuple qui commande le plus

À l’ombre d’un chêne vert
Qui ne connaissait plus son âge
J’ai juré d’avoir pour compagne
Grândola, ta volonté

Grândola, ta volonté
J’ai juré d’avoir pour compagne
À l’ombre d’un chêne vert
Qui ne connaissait plus son âge

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